Chaque année, des animaux sont tués car considérés comme « espèces susceptibles d’occasionner des dégâts » (ESOD). Au-delà du questionnement éthique qu’un tel classement peut produire (un être humain n’occasionnerait-il pas plus de dégâts qu’une belette ou un geai des chênes ?…), force est de constater que l’établissement de ce classement est discutable, tout comme la mise en application de la « destruction » de ces animaux dits nuisibles.

Un classement relativement douteux et une « régulation » controversée

Intéressons-nous d’abord à ce classement : aujourd’hui, les espèces animales susceptibles d’être classées ESOD sont réparties en trois groupes (décret du 23 mars 2012 relatif aux espèces d’animaux classés nuisibles).
1er groupe : espèces envahissantes sur l’ensemble du territoire métropolitain, classées ESOD pour l’ensemble du territoire national par voie d’arrêté ministériel : chien viverin, ragondin, raton laveur, bernache du Canada, vison d’Amérique, rat musqué.
2e groupe : espèces classées ESOD par arrêté ministériel triennal, sur proposition du préfet, après avis de la formation spécialisée de la CDCFS : belette, fouine, martre, putois, renard, corbeau freux, corneille noire, pie bavarde, geai des chênes, étourneau sansonnet.
– 3e groupe : animaux classés ESOD sur le département, classés par voie d’arrêté préfectoral annuel. Exemple, pour la Savoie : lapin de garenne et sanglier.*

Qu’est-ce qui est réellement entendu par « dégâts » ? Ce sont, par exemple, des dégâts causés sur les cultures, des nuisances, des risques sanitaires en cas de surpopulation, des espèces non endémiques et concurrençant les espèces déjà présentes sur le territoire… Effectivement, vue de cette manière, une régulation pourrait sembler bénéfique pour l’ensemble de la faune et de l’environnement.

Toutefois, comme l’explique je journal Le Monde, aucune étude scientifique ne prouve l’intéret de la destruction de ces animaux dits « nuisibles ». Bien au contraire, d’après une étude publiée dans Biology Letters, cette pratique ne permettrait pas de réduire les nuisances et pourrait même les aggraver. C’est le postulat que vient renforcer une étude réalisée en France en 2017, démontrant que l’abattage intensif des renards aurait renforcé la transmission d’un virus dangereux pour l’homme, l’Echinococcus multilocularis.
Par ailleurs, certaines espèces ESOD, comme le putois ou le lapin de garenne, sont aujourd’hui en voie de disparition sur le territoire français.** Ce qui peut nous pousser à douter sérieusement de la pertinence de cette pratique.

Une demande adressée à la Ministre de la Transition écologique pour remédier à cette situation déplorable

En juin dernier, l’association Animal Cross, soutenue par le Groupe d’Etude des Mammifères de Lorraine et 51 Associations de Protection de la Nature (dont bien évidemment l’AJAS), ont rédigé une pétition adressée à Barbara Pompili, la Ministre de la Transition écologique.

Animal Cross y dénonce que le processus de classification des animaux « nuisibles » ainsi que la mise en application de leur « régulation » sont inéquitables, biaisés et orientés exclusivement vers la destruction.

L’association constate :

  • L’absence de prise en compte des services écosystémiques rendus par ces espèces, démontrés par de nombreuses études scientifiques,
  • L’absence d’évaluation de l’impact de la destruction, chaque année, de plus d’un million d’animaux appartenant à ces espèces considérées « ESOD » depuis la mise en place de la réglementation en vigueur en 2012,
  • Le non-respect des règles de composition des commissions CDCFS (Commissions Départementales Chasse et Faune Sauvage), qui fixent les listes d’espèces « ESOD », en faveur des chasseurs,
  • L’inscription d’espèces sur la liste des « ESOD » malgré l’absence de dégâts significatifs (avec perte économique) et avérés,
  • L’absence de prise en compte de méthodes alternatives à la mise à mort de ces animaux, pourtant exigée par la réglementation pour certaines espèces (oiseaux, martres, putois), tels que les moyens de protection dont l’utilité a été prouvée via des études de terrain.

La pétition demande à la ministre d’écouter enfin l’appel émis cette année par de nombreuses associations et députés, et de mettre en place l’audit neutre souhaité*** de la réglementation en vigueur relative aux « ESOD » et de son application actuelle, et cela avant la prochaine échéance de classement qui aura lieu en 2022. A cette date, la pétition a déjà récolté plus de 55 000 signatures.

Vous pouvez contribuer à cette initiative en faveur des animaux en la signant et en la partageant dès à présent : https://www.mesopinions.com/petition/nature-environnement/evaluation-reglementation-animaux-dits-nuisibles/147791

Pour en savoir plus : https://www.youtube.com/watch?v=9P74gj3FrPA

*Source : https://www.savoie.gouv.fr/content/download/32811/238605/file/ Note_presentation_projet_classement_nuisibles_Savoie.pdf ** Source : vidéo « Faut-il abattre les animaux « nuisibles », Plan B » de Le Monde : https://www.youtube.com/watch?v=hmVQk2ok24Y, 2020 *** Initiative déjà portée dans 21 départements par les membres bénévoles d’Associations de Protection de la Nature qui siègent en CDCFS et qui ont interpellé le Ministère de la Transition Écologique, directement ou via leurs députés, à travers l’envoi d’une requête, qui détaille les dysfonctionnements constatés et demande un audit neutre de la réglementation. Aucune réponse du Ministère de la Transition Écologique n’a été obtenue à ce jour (Mai 2021).

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